Roberto Alagna Aleksandra Kurzak, Philharmonie de Paris le 14 février 2022

LE CONCERT

Il y a eu les airs classiques que nous attendions. Il y a eu la révélation du duo Thaïs ( II, 3), où Roberto Alagna offre un air de baryton, il y a eu le Vissi d’arte d’Aleksandra Kurzak et qui lui a valu des acclamations comme son air de « Louise (que chantaient nos grands-mères et nous nous posions l’impertinente question de savoir si, dans leur tendre jeunesse, elles avaient été aussi sages qu’elle nous demandaient de l’être), qui a fait chavirer la salle d’un voluptueux abandon.

Il y eu les transports soulevés par le Cielo e mar d’Enzo ( La Gioconda ,III, 4), dont la sensualité romantique a continué de s’épanouir avec l’air de Lyonel ( Martha ,III, IV) en gerbes d’espérance d’amour qui emportaient inlassablement la salle dans le rêve d’un bonheur infini révélé par des piani dont les filés de lumière aux succulences célestes semblaient changer en italien les rugosités germaniques. Et il fallait faire un effort pour comprendre pourquoi, alors qu’on comprenait chaque syllabe, si l’on n’était pas germanophone, on ne comprenait pas le sens littéral, alors que cette voix d’ange nous le faisait si bien comprendre, en allant se nicher dans le cœur -, preuve une fois de plus qu’il ne faut pas lire les sous-titres mais s’envoler avec les chanteurs là où ils veulent nous conduire.  

Il y a eu ce couple de chanteurs, qu’on a déjà entendu en concert, qui, une fois encore, ensemble, va plus loin.
Non sans humour, le jour de la fête des amoureux, ils ont terminé avec la querelle magnifique de Cavalleria Rusticana qui révèle les ambiguïtés de l’amour/non amour. Ils ont transporté le public et ont quitté la scène sous des salves d’acclamations.

Il existe entre eux une fluidité du jeu d’acteur et une entente tellement sûre des voix, qui s’allient sans jamais se heurter ni que l’une tente de dominer sur l’autre. Leur accord tour à tour tragique, amoureux et joyeux, les fait rayonner de joie avec la salle pendant les bis.

Ci-dessus avec le chef David Giménez

Le contexte Covid est encore si rude que dans la salle (tout le spectacle le masque sur le nez) jusqu’aux plus sérieux des mélomanes, après les splendeurs de Cavalleria qui achèvent le concert, se sont laissés emporter par l’allégresse de leur funiculi funicula et le pétillement d’un chant auquel Aleksandra Kurzak et Roberto Alagna ont mêlé la grâce de leur danse.

Note :
Alors que le visage d’Aleksandra Kurzak, de la tendresse à la colère, laissait entrevoir, peut-être, ce que serait sa prochaine Tosca au Metropolitan, les traits de Roberto Alagna, d’une indicible douceur où frémissait l’inquiétude et la crainte de l’amour espéré, liait les deux héros, Enzo et Lyonel, comme en des airs jumeaux.

© Jacqueline Dauxois

Une réflexion sur “Roberto Alagna Aleksandra Kurzak, Philharmonie de Paris le 14 février 2022

  1. Merci Jacqueline , grâce à vous ,et sans être présente à la Philharmonie ,j’ai  » assité  » à un magnifique concert , ponctué d’une bande audio en direct ! le summum !
    merci à vous pour tous vos commentaires
    Bien à vous
    Gina

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